mercredi 13 juillet 2011

Vous voyez, tout est bien.

Dans ma vie publique, je vais plus souvent à des enterrements qu'à des baptêmes ou des mariages. Entre la vie, l'amour et la mort, c'est celle-ci qui me réclame. C'est ainsi, c'est la vie ! Aujourd'hui, je me suis rendu aux obsèques d'André Bocquillon, ancien maire de Bernot, disparu à 90 ans, que je connaissais bien depuis quelques années, puisqu'il manquait rarement une séance du café philo.

Le café philo à Bernot, c'est un petit bijou ! La formule fonctionne en ville, mais rarement dans les villages. Bernot est une exception, tant mieux ! Nous devons cette réussite au Foyer rural, organisateur de la manifestation. André au café philo, c'était la bonne humeur, l'esprit frondeur et parfois la chansonnette ! Un brave homme ...

L'église, cet après-midi, était pleine, beaucoup d'amis et de connaissances n'ont pas pu entrer. On reconnaissait des maires et des élus du coin, pas mal d'agriculteurs puisque André Bocquillon était des leurs, entre la mairie et son tracteur. C'est étrange : il faut assister à un enterrement pour comprendre l'influence d'un homme, que lui-même ne peut pas vraiment constater de son vivant.

La cérémonie était très sobre, très digne, avec ferveur et concentration. Ce n'est pas toujours le cas. J'ai souvent assisté à des funérailles glacées, où l'assistance restait muette ou bredouillant, en contraste avec des pleurs impressionnants jusqu'à en devenir gênants.

C'est d'ailleurs logique : la mort tourne à la tragédie ou à l'absurdité quand elle ne débouche sur aucun espoir de survie. André Bocquillon était croyant, sans bigoterie puisqu'il ne faisait jamais état de sa foi dans nos débats. Cet engagement n'est sans doute pas pour rien dans l'atmosphère paisible et confiante dans laquelle se sont déroulées ses obsèques.

J'ai apprécié et retenu le beau poème de Charles Péguy (curieusement attribué aussi à saint Augustin !) lu par l'un des nombreux petit-fils d'André, qui résume parfaitement l'idée que celui-ci se faisait de la mort, dans le grand âge qui était le sien, texte que je tiens à vous faire partager :

Vous voyez, tout est bien

La mort n'est rien, je suis simplement passé dans la pièce à côté.

Je suis moi, vous êtes vous,
Ce que nous étions les uns pour les autres, nous le sommes toujours.
Donnez-moi le nom que vous m'avez toujours donné,
Parlez-moi comme vous l'avez toujours fait,
N'employez pas un ton solennel ou triste,
Continuez à rire de ce qui nous faisait rire ensemble,
Priez, souriez, pensez à moi,
Que mon nom soit prononcé comme il l'a toujours été,
Sans emphase d'aucune sorte, sans trace d'ombre,
La vie signifie tout ce qu'elle a toujours signifié,
Elle est ce qu'elle a toujours été. Le fil n'est pas
coupé, simplement parce que je suis hors de votre vue.
Je vous attends. Je ne suis pas loin,
Juste de l'autre côté du chemin.
Vous voyez, tout est bien.

Aucun commentaire: