lundi 28 juillet 2014

La politique au lit



Il y a beaucoup de façon de faire de la politique : discuter, écrire, agir ... Mais je viens d'en découvrir une assez étonnante : dormir ! Ce n'est pas une plaisanterie. Le magazine La Vie consacre cette semaine un article à cette nouvelle définition de la politique : "Les nuits sans sommeil du capitalisme". La semaine dernière, ce sont les Inrocks qui traitaient du sujet : "Dormeurs de tous les pays, unissez-vous !" L'idée a été levée par un philosophe américain que je ne connais pas, Jonathan Crary, dans son ouvrage récent, "Le capitalisme à l'assaut du sommeil".

Comme les titres l'indiquent, il s'agit rien moins qu'une nouvelle révolution qui est envisagée. L'analyse est assez simple : le marché exploite l'homme dans toutes les dimensions de l'existence, y compris le sommeil. Car dormir est une perte de temps (et donc de profits) pour le libéralisme. Il faut donc prolonger le travail jusque dans la période où le corps est censé se reposer. Par quels moyens ? La technologie, les écrans, qui par leur effet hypnotique nous maintiennent en éveil.

C'est fou ? Sans doute, mais, de fait, nous dormons moins qu'autrefois : 7 heures par jour en moyenne, contre 10 heures au début du XXe siècle. En même temps, c'est aussi parce que nous travaillons moins, et surtout moins durement, que nous avons donc moins besoin de repos. Je ne suis donc pas convaincu par la thèse de Crary. Je veux bien croire que le sommeil, en tant que liberté, plaisir, rêve, a une dimension subversive (ceux qui se lèvent tard sont mal vus). D'ailleurs, l'idée est ancienne : on la trouve, plus ou moins, dans "Le droit à la paresse", de Paul Lafargue, le gendre de Karl Marx. De là à voir dans le sommeil l'ultime contestation de la société capitaliste, j'en doute un peu. Déjà, le slogan de Mai 68, "plus je fais l'amour, plus je fais la révolution", me laissait sceptique.

En tout cas, je ne suis pas prêt de penser qu'on fait de la politique en restant dans son lit. François Mitterrand dénonçait "ceux qui gagnent de l'argent en dormant" : ça, je comprenais. Mais la politique dans les draps, non. Cette nouvelle et surprenante théorie s'applique cependant fort bien à Xavier Bertrand, qui se targue de ne dormir que 4 ou 5 heures par nuit : preuve, s'il n'en était, que c'est un homme de droite, si l'on en croit ces nouveaux révolutionnaires du sommeil.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

C'est un bon billet dédié à votre maître à penser DSK ...

Anonyme a dit…

<< discuter, écrire, agir >>
C'est TOUT , c'est peu !!

Pas se former ??

Pas d'études de dossiers ??

Pas de visites de terrains ??

Pas de réunions de travail ??

Emmanuel Mousset a dit…

1- Un peu facile, mais drôle quand même.

2- Oui, bien sûr, c'est tout ça, et plus encore, mais je ne pouvais pas tout citer.

Anonyme a dit…

Le lit antichambre de la politique?

Emmanuel Mousset a dit…

A moins que ça ne soit l'inverse.