vendredi 17 octobre 2014

J'aime ce gouvernement



J'aime ce gouvernement. Vous me direz que je n'ai pas de mérite, puisque je suis socialiste. C'est vrai et c'est faux : il y a des socialistes, j'en connais, qui n'aiment pas ce gouvernement. C'est camarade Schizo : carte du PS dans une poche, canif dans l'autre. Au niveau national, on les appelle les frondeurs. Leur vrai nom : les farceurs. Oui, en dépit d'eux, contre eux, j'aime ce gouvernement, parce que c'est le gouvernement de la réforme sociale. Les exemples ne manquent pas, j'en prends trois durant cette semaine :

1- La modulation des allocations familiales. Je la voulais, je l'espérais depuis longtemps, c'est (presque) fait. J'ai souvent évoqué cette réforme sur ce blog. Pure justice sociale : donner moins à ceux qui ont plus. Le principe d'universalité (dont, par ailleurs, je me contrefous mais qui plaît à beaucoup) est préservé : chaque famille touchera au moins un petit quelque chose. Eh bien, savez-vous que Benoît Hamon et les frondeurs sont contre ? Quand je vous disais que ce sont des farceurs ...

2- Le développement du transport par autocar. Les tarifs de la SNCF sont scandaleusement élevés. Et quand on pense que c'est un service public ! La solution ? L'autocar, dont le réseau est plus dense, la circulation plus souple. Pour les courts et moyens trajets, c'est un moyen excellent. Le ministre Macron a proposé d'assouplir sa réglementation, pour aider à son développement. La mesure est éminemment sociale, puisqu'elle bénéficiera aux plus pauvres, l'autocar étant 8 à 10 fois moins cher que le train.

Oups, qu'est-ce que je viens de dire là ? J'ai employé le mot de "pauvre". Pas bien, ça. Les "pauvres", il ne faut plus en parler, il faut les cacher, il faut décréter qu'ils n'existent plus. Mais quel mot employer, puisqu'il faut bien continuer à parler ? Les "démunis", est-ce que ça passe mieux ? Les "gens qui sont dans le besoin" ? Les "cas sociaux" ? Les "personnes économiquement faibles" ? Les "gens de peu" ? Les "familles modestes" ? C'est compliqué, comme on dit sur Facebook. Vous me permettrez donc d'utiliser le mot qu'on emploie depuis toujours, les "pauvres", même s'ils ne sont pas les seuls à prendre l'autocar. Ah, si Emmanuel Macron avait employé le terme sacro-saint de "classes moyennes", il aurait été encensé, puisque l'expression est répétée matin, midi et soir, par tous, partout, jusqu'au non sens, jusqu'à la nausée.

3- La généralisation du tiers payant. Quelle révolution en matière sociale ! Plus besoin d'avancer l'argent chez le médecin. Et là, ce n'est pas seulement les pauvres (je suis incorrigible) qui vont en profiter, mais les petits bourgeois aussi (qui ne prennent pas l'autocar mais vont chez le toubib). Les grands bourgeois, eux, ont suffisamment de moyens pour ne pas se poser ces questions de transport et de remboursement de soins (c'est pourquoi Benoît Hamon et les farceurs n'ont pas à pleurnicher parce qu'on leur sucre un peu leurs allocs).

J'aime ce gouvernement, socialiste et social. Mais pourquoi sommes-nous si peu à l'aimer ? D'abord, ne préjugeons de rien, attendons les prochaines élections, on verra bien. Mais il y a des explications objectives à ça :

- Dans une société individualiste, les gens ne pensent qu'à eux-mêmes, perdent le sens de l'intérêt général et, par dessus tout, ne veulent pas qu'on les embête avec les "pauvres" (je récidive, je serai bientôt bon pour le tribunal du politiquement correct).

- Dans un monde de l'image choc et du mot chic, ce qui compte, ce qu'on retient n'est pas ce qu'on fait, mais ce qu'on montre, ce qu'on dit et comment on le dit. D'où la police du langage, qui sévit grave depuis quelques années. Macron n'est pas allé à cette école. C'est un philosophe, il dit tout simplement les choses comme il les pense.

- Les premiers défenseurs du gouvernement, ce devrait être les socialistes, mais le job n'est pas fait. Je ne parle pas de la direction du parti, qui est offensive. Mais, à la base, bien des sections traînent de la patte, rasent les murs, ne sont pas les pédagogues de l'action gouvernementale qu'elles devraient pourtant être. Espérons que les Etats Généraux changeront un peu quelque chose à ça, feront bouger les lignes, dérangeront la confortable et prudente inertie, pour que chaque socialiste aime enfin ce gouvernement.

6 commentaires:

Anonyme a dit…

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Un peu

BEAUCOUP

PASSIONNÉMENT

A la FOLIE

Cocher SVP la ligne choisie , vous pouvez gagner une nuit dans le gite où ont dormi VALLS & LE FOLL

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Emmanuel Mousset a dit…

"Un peu", c'est trop peu. "A la folie", non, je reste raisonnable et rationnel dans mon soutien. "Passionnément", non plus : j'ai bien d'autres passions que la politique, et plus importantes. "Beaucoup", ça me va, c'est le mot juste.

Pour la nuit dans un gite, ce n'est pas trop mon truc, faites-en profiter quelqu'un d'autre.

Anonyme a dit…

Des analyses pertinentes mais on ne peut que regretter les comportements d"autruches" ou les résistances à l'adaptation des doctrines au XXI ème siècle.La société est en mutation rapide depuis dix ans,il est nécessaire de la suivre au risque d'un décalage déjà existant et qui va continuer à se creuser,entre les attentes de notre électorat et d'une partie des militants et ce que le P.S.propose.

Anonyme a dit…

La société est en perpétuelle mutation , le Monsieur qui parle d'analyses pertinentes est amnésique , en 14 l'aviation est en pleine naissance moderne , en 36 c'est le début d'une gouvernance sociale qui sera reprise en 45,et aussi l'arrivée hélas dramatique de l’ère du nucléaire ; l' informatique préhistorique permet le débarquement de Normandie et depuis nous sommes des connectés et des robotisés ... Alors si l'évolution n'est pas rapide depuis 100 ANS ; c'est que on ne connait pas ses dossiers ...
. Il eut été plus correcte de dire ; que les évolutions se généralisent à toutes la planète et pas seulement en EUROPE , au JAPON où en Amérique du NORD ..
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Erwan Blesbois a dit…

Tout le monde a toujours raison, puisque chacun se vit comme le centre du monde. Ce qui reflète le degré de réalité d'une vérité, c'est la force de conviction avec laquelle on l'affirme. Il n'y a donc pas de vérité, mais seulement la réalité. Est-ce une coïncidence si tu es toujours d'accord avec ce gouvernement, ou est-ce la façon, en "fayotant" pour le fort, que tu as d'exprimer ta vérité avec le plus de conviction. Hier Chédin (l'"homme fort" de la Sorbonne), aujourd'hui Hollande. C'est en réalité un exercice d'admiration que je fais là, car l'important est de savoir gagner pour être audible.

Erwan Blesbois a dit…

Je ne pourrais pas faire de politique, cela demande une discipline et une soumission, comme une seconde nature. Mais les "artistes" ne valent pas mieux : Les artistes, souvent ne s'aiment pas entre eux, ils admirent de façon démesurée pour créer, ensuite ils rejettent leur modèle, comme on élimine ses propres déchets organiques. Un artiste est comme un vampire, vous pensez qu'il vous admire, en réalité il vous suce le sang : d'où la fascination d'un grand artiste comme Polanski pour les vampires, le vampire c'est lui, Polanski. Propre fascination pour son image dans le miroir, voilà la définition de l'artiste, image qu'il ne voit pas dans le miroir car il est un vampire, mais qu'il voit dans le regard des autres : effroi et fascination, quand il est un véritable artiste. A lui de savoir gagner l'admiration des autres pour être audible, et pour survivre en tant qu'artiste.