dimanche 17 mai 2015

Un problème avec les autres



La France a un problème avec les autres, migrants, immigrés, étrangers, enfants d'étrangers. Elle s'interroge sur son identité, se replie, vote xénophobe. Nous ne devrions pas : nous sommes un grand pays, qui devrait être fier et sûr de lui, sans craindre la différence, sans redouter l'Europe et le monde. Cette semaine qui s'achève, nous avons hélas été servis :

L'ONU a rendu public un rapport accablant sur l'état de la France en matière de respect du droit des étrangers. Pour le pays des droits de l'homme, ça la fiche très mal ! Allons-nous dire que ce rapport ne vaut rien et que l'ONU n'a qu'à se mêler de ce qui la regarde ? Mais justement : c'est le rôle des Nations-Unis de faire ce genre de travail. Et que constate-t-il ? Que la xénophobie dans notre pays est véhiculée par les médias et la classe politique, que les Roms sont victimes de discriminations et de violences. Quand va-t-on y remédier ?

Eric Ciotti, secrétaire national de l'UMP, ne se pose pas cette question, puisqu'il a proposé de rétablir le droit du sang, à la logique très simple : est Français toute personne qui a du sang français dans les veines. C'est l'hérédité qui commande à la nationalité. Pour moi et pour n'importe qui, c'est la naissance et la présence sur le territoire, qu'on appelle le droit du sol, que Nicolas Sarkozy lui-même, il y a quelques années, refusait de remettre en cause, tant nos fondements républicains en seraient affectés.

Robert Chardon, autre UMP, maire et vice-président de communauté de communes, est allé encore plus loin, en demandant carrément d'interdire le culte musulman. C'est fou, mais c'est dans la logique d'une laïcité dénaturée, trahie, devenue folle (voir mon billet "Jules Ferry, réveille-toi !"). On commence par prohiber les signes religieux à l'école, on continue dans les structures éducatives privées, on passe ensuite à l'université, puis à l'entreprise, on élargit à l'ensemble des services publics et on termine, en toute cohérence, par l'interdiction du culte musulman dans tout le pays. La République française veut-elle encore rester ou non une République ?

Ciotti et Chardon sont des hommes de droite, minoritaires dans leur propre parti. Je condamne, mais je ne suis pas trop surpris. En revanche, je suis attristé par le refus des quotas migratoires par mon cher Manuel Valls, d'autant que je m'étais félicité, dans un récent billet ("L'honneur de l'Europe"), du soutien du ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, à ce projet de la Commission européenne. Le Premier ministre argumente en défendant un choix qui ne devrait dépendre selon lui que de la souveraineté française. Mais est-on européen ou pas ? Un socialiste n'est pas un souverainiste. La tragédie des migrants en méditerranée ne peut se régler qu'au niveau européen, par la concertation et la décision unanime de toutes les nations, que les institutions européennes ne contraignent pas (mais quand un traité est signé, il faut le respecter).

Deuxième argument de Valls, plus sérieux : la France a déjà beaucoup fait pour les migrants, le calcul des quotas devrait être en quelque sorte rétroactif, en prenant en compte les efforts passés. Je ne suis pas convaincu : à raisonner ainsi, on ne fait rien. Ce qui compte, c'est le présent et l'urgence, pas ce qu'on a fait ou pas fait avant. La puissante et riche Europe est tout à fait en mesure d'accueillir plusieurs dizaines de milliers de migrants sur son sol. La Commission européenne a fait un travail remarquable pour déterminer des quotas par pays, selon des critères précis, qu'on ne va pas gâcher parce que le critère d'antériorité n'est pas enregistré. Ou bien, qu'on assume ce refus et qu'on ne donne plus de leçons de morale et d'humanitarisme au prochain drame, puisqu'on ne se sera pas donné les moyens politiques de l'éviter.

La France a un problème avec les autres, c'est un fait. Mais j'aimerais que la gauche française, elle, n'ait pas de problème avec les autres.

1 commentaire:

MF a dit…

des quotas pour les immigrés? une solution qui semble "sensée" mais qui est absolument impossible à mettre en œuvre:qu'on le veuille ou non les humains se regroupent de toute façon en fonction de leur nationalité ,leur ethnie, leur religion..etc...;aussi sauf à créer des centres de regroupement( en d'autres temps on appelait ça la concentration,voire des réserves d'Indiens) on ne pourra jamais éliminer cet instinct grégaire;pour avoir vécu 8 ans hors métropole je sais de quoi de parle;il faut faire avec mais que ça va être difficile de régler cette situation vu les fossés qui existent entre les 27 pays européens sur cette question