jeudi 1 octobre 2015

Une vie de président



Je  regarde presque tous les documentaires politiques à la télévisions, surtout les bons. Celui de lundi soir, "Un temps de président", d'Yves Jeuland (sur France 3) était annoncé comme excellent. Il m'a laissé dubitatif, j'en ai gardé un goût étrange, par l'image qu'il donne de la politique, pas vraiment négative, mais différente de ce qu'on imagine.

D'abord, il y a un calme surprenant qui se dégage de l'univers élyséen. Des salles et des couloirs immenses, vides, qui semblent absorber tous les bruits du monde, entre la moquette épaisse et les hauts plafonds. Je perçois la politique comme une activité énervée, stressante, faite de coups de gueule et de portes qui claquent. Mais là, non : entre François Hollande, ses conseillers et ses interlocuteurs, les échanges sont tranquilles, les corps se déplacent lentement. L'actualité ne semble agitée que sur les écrans de télévision. J'en viens à me demander si le secret de la force en politique n'est pas dans cette sorte d'immobilité.

Ensuite, et par conséquent, une forme d'ennui parcourt tout le documentaire. Alors qu'on s'attendrait à une existence politique passionnée, lyrique et même tragique, c'est ici la routine qui prédomine. Même la séquence historique qui suit l'attentat contre Charlie hebdo est dénuée de toute dimension historique. Hollande et les siens semblent discuter sur pas grand chose, jamais vécu comme très important (une remise de médaille à Jean d'Ormesson est un exemple parmi d'autres). Ce n'est plus la normalité à l'Elysée, mais la banalité, qui ne donne guère envie du métier.

Enfin, et c'est le plus étonnant, un comique involontaire et raffiné, à la Jacques Tati, ressort de cette succession d'images (on dirait un film muet, tellement la parole est basse, rare et sans gravité). La démarche un peu mécanique des personnages, les visages et les sourires neutres, un peu figés, les regards qui ne regardent pas vraiment sont drôles malgré eux (François Hollande en est la meilleure expression, avec tout le respect et l'estime que j'ai pour lui).

Surtout, il y a des scènes irrésistibles : le conseiller en communication partout présent auprès du chef de l'Etat, mais dont on ne voit pas très bien à quoi il sert, ayant son téléphone comme vissé à l'oreille ; la pluie au début qui tombe sans cesse, qui rappelle les seaux d'eau que reçoit à répétition Charlot dans ses films ; les discours manuscrits du président qu'une conseillère est obligée de décrypter avec une énorme loupe ; le fer à cheval que tient Hollande dans une main, qu'on lui a offert lors d'une cérémonie équestre, et dont il n'arrive plus très bien à se débarrasser ...

J'attends de la politique qu'elle me passionne, m'enthousiasme, me fasse rêver. Dans ce documentaire, rien de tel, mais un je-ne-sais-quoi, comme aurait dit Vladimir Jankélévitch, qui ne me plait pas, ne m'attire pas, ne m'inspire pas. Mais c'est peut-être le parti pris du réalisateur.

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