mardi 27 septembre 2016

L'heure de vérité



En politique comme dans la vie, il y a toujours une heure de vérité. Mais on ne sait pas trop à quel moment elle va sonner. Surtout dans la vie. Peut-être à l'instant de mourir ... En politique, c'est différent. Je me souviens, il y a longtemps, d'une bonne émission télévisée, qui s'appelait "L'Heure de vérité". Un politique politique était soumis à un feu de questions, qui étaient censées faire la vérité sur le personnage invité.

C'était une émission intéressante, mais pas très convaincante. Car la véritable heure de vérité, pour un homme politique, c'est la confrontation avec l'adversaire. L'échange avec les journalistes est bien sûr nécessaire, mais il n'est pas complètement probant : journalistes et politiques ne boxent pas dans la même catégorie, il y a inégalité de départ entre eux. Pour qu'une force politique se révèle, il faut l'affronter à une autre force politique.

Quelles sont les qualités indispensables en politique ? Avoir des convictions et avoir des capacités. Si vous n'avez que des convictions, de belles et justes idées, mais aucun talent personnel pour les mettre en œuvre, vous n'êtes pas un bon. Si vous avez de nombreux talents, mais une absence de projet, de convictions, vous n'êtes pas non plus un bon. Convictions et qualités, il faut les deux.

Mais qu'est-ce qui permet de prouver que vous les avez ? Non pas un discours devant ses propres partisans, qui vous trouveront toujours très bons, même si vous êtes très mauvais. Quand on est entre soi, on peut toujours faire illusion. En revanche, face à l'adversaire, quand il faut répondre à des coups portés sans ménagement, il n'y a plus de mensonge possible : c'est l'heure de vérité. Tant que le boxeur est devant son miroir à s'entraîner, il ne sait rien de ses vraies capacités. C'est sur le ring, en pleine lumière, confronté à l'adversaire, qu'il sait vraiment ce qu'il est et ce qu'il vaut.

Cette nuit, aux Etats-Unis, sauf surprise dans les jours qui viennent, nous avons appris qui serait le prochain président : Hillary Clinton. Pourtant, cette femme a bien des défauts, fait montre parfois d'une certaine fragilité, n'est pas toujours très bonne communicante, laisse apparaître à certains moments une forme d'arrogance. Tout ça n'est évidemment pas très payant électoralement. Mais hier soir, devant Donald Trump, elle a été magistrale, elle a totalement dominé le débat, elle a prouvé qu'elle seule était digne de devenir le prochain président des Etats-Unis. Hier soir, elle avait tout pour elle : la compétence, l'expérience, la répartie, la distance et même une forme de légèreté de bon aloi quand il le fallait.

Donald Trump ? Il porte bien son prénom ! Un lourdaud, un démago, un dingo. Quand il est seul, devant ses partisans, il porte beau, fait de l'effet, amuse la galerie, impressionne les gogos. Là, et seulement là, il engrange des voix, monte dans les sondages et fait des rêves de Maison Blanche. Mais quand on le met en face d'Hillary, il n'y a pas photo : le candidat qui a du poids n'est plus celui qu'on croit. A des questions importantes qu'on lui pose, y compris personnelles, il ne sait pas répondre, il n'est pas, au sens étymologique du terme, responsable. L'heure de vérité en politique n'est pas dans le soliloque, mais dans le face-à-face.

Hier soir aussi, un autre face-à-face s'est produit, moins solennel, pas aussi symétrique et depuis longtemps répété : lors de la séance du conseil municipal à Saint-Quentin. Là, de même, les masques tombent, les convictions et les qualités, leurs limites ou leur absence, s'étalent aux yeux de tous, parfois cruellement. S'il n'y avait pas ces rencontres, on ne saurait rien de ce que valent les uns et les autres. La démocratie est pleine de surprises : la grande gueule en privé peut s'avérer piètre orateur en public ; la silhouette discrète peut se révéler d'une audace inattendue quand il faut se défendre ou attaquer.

Voilà l'heure de vérité, qu'un homme politique peut retarder, mais à laquelle il ne peut pas échapper, dès qu'il met les pieds dans l'arène. Plus j'y pense et plus je me dis qu'en politique, il n'y a pas les méchants et les gentils, comme le voudrait la légende, de gauche comme de droite ; non, il y a les bons et les mauvais. Et c'est à l'heure de vérité qu'on le sait.

11 commentaires:

Philippe a dit…

Pour Trump et Clinton attendons, je penche plutôt comme vous mais je ne connais absolument pas les mœurs américaines populaires … je n’en connais que ce qu’en disent nos ineffables journalistes roses, par exemple un crime policier « raciste » mettant en scène un policier noir qui tue un autre noir soit disant délinquant et dont l’officier supérieur devant les micros est un noir !!!!!!!!!!
J’adhère à votre analyse concernant le choix d’un leader.
Mais c’est seulement valable en médiocratie, c’est à dire heureusement la plupart du temps, me semble-t-il.
Il faut bien ajouter une petite pierre, à toute règle générale il y a des exceptions marginales mais exceptions cependant.
Quand il y a péril vital pour une société apparaît l’homme ou la femme « simpliste » car on est arrivé à l’heure de l’essentiel … du choix simple, binaire … voulez-vous survivre au sein de votre entité sociale, au final voulez-vous que cette dernière survive ?
Dans la période moderne la Grande Bretagne a connu ce moment. On est aller chercher Churchill.
Il ne s’est pas confronté à un concurrent il est devenu 1er ministre le 10 mai 1940 par défaut de tous les autres.
En France il en fut de même pour Charles De Gaulle le 29 mai 1958 par défaut de tous les autres., le Palais Bourbon suait la peur.
L’un politicien très atypique, l’autre militaire très atypique sont arrivés au pouvoir à ce moment T de leur vie sans concurrents, qui, eux, pensaient tous … après avoir merdé je me tire …. dans les deux cas les rats quittaient le navire ...
Au fond c’étaient des chefs de guerre comme il en surgit régulièrement dans l’histoire des sociétés, c’est banale dans l’exceptionnel.
Notre médiocratie pseudo-souverainiste confortable et marchande confite dans la honte d’elle-même et dans les cérémonies de repentances successives peut-elle survivre devant l’assaut de l’identité musulmane avec sa fierté d’être boostée par l’afflux de ses adeptes venant de pays identitaires ?

Anonyme a dit…

Je ne suis pas,surpris de votre choix en faveur de Madame Clinton, comme Macron. Celui des gens riches, très riches, trop riches, qui ne gouverneront jamais pour le peuple comme tout homme de gauche se devrait en priorité. Après cela ces hypocrites s'étonnent de l'apparition et de la progression spectaculaire, voire de l'arrivée au pouvoir de formations populistes mais par aveuglement volontaire ils en sont les "idiots utiles". En fait Emmanuel Mousset se dit un homme de gauche mais raisonne comme un homme de droite qu'il est devenu lui et tous les politiques dont il se sent proche.
Il soutient Madame Clinton, la reine du chaos comme l'a surnommé une journaliste américaine Diana Johnstone parce qu'elle a soutenu depuis 1992 toutes les guerres extérieures qu'ont mené son pays depuis la présidence de son mari, les guerres d'agression qui sèment partout la ruine, la désolation chez tous les peuples qui les ont subies. Depuis la Somalie en 1992 jusqu'à l'agression de l'Irak, la Libye et la Syrie. Comme Madame Clinton, c'est un néoconservateur américain à passeport français comme disait en 2006 de Sarkozy ,le socialiste qui a rallié Sarkozy.
Madame Clinton c'est aussi les prédateurs de la finance de Wall Street par leurs exigences exorbitantes de rentabilité du capital au détriment de l'industrie, même aux USA. Ce sont eux les responsables de la crise financière de 2007 non résolue parce que ses auteurs n'ont pas été désarmés. Ce sont eux qui gouvernent le monde puisque les politiques leur ont livré partout dans le monde les clés du pouvoir réel.
Tout ce que pourra bien dire Monsieur Mousset ne pèse pas.

Anonyme a dit…

Aux states, rien ne peut étonner lors de leurs élections...
Avoir élu ici ou là des personnages tels le faiseur de break grâce au ping-pong, un marchand de cacahuètes, un bodybuildeur, un dégringoleur de passerelle d'aviation, un père et un fils va t'en guerre, un as de la pipe ou d'autres, milliardaires d'un bord comme de l'autre est bien le signe que s'ils se croient là bas (dixit Salinger) la plus grande démocratie de la planète, leurs institutions ne sont guère meilleures que les nôtres.
Alors, que soit venu le tour du businessman d'Atlantic City, pourquoi non ?

Emmanuel Mousset a dit…

Le commentateur qui me reproche de soutenir Clinton parce qu'elle est riche se trompe : Trump est beaucoup plus riche qu'elle.

Anonyme a dit…

Madame Clinton est trop riche et l'enrichissement du couple Clinton et de sa fondation est suspecte aux yeux des américains. Si Trump est plus riche que Madame Clinton sa richesse vient de son activité professionnelle d'entrepreneur immobilier donc de création d'emplois. Ce qui fait que Madame Clinton n'est pas si populaire auprès des américains mais plus auprès des médias plus complaisants qu'avec Trump.
Bill Clinton est l'un des responsables de la crise financière de 2007 par son abrogation de la loi Glass-Seagall datant de 1933 qui séparait l'activité des banques d'affaires et banques de dépôt, ce qui leur a permis de faire n'importe quoi. Elles ont bien rendu aux Clintons le service.

Emmanuel Mousset a dit…

Trump n'a rien créé du tout, à part des faillites et des licenciements massifs. Joli modèle que vous nous proposez là !

E a dit…

"sa richesse vient de son activité professionnelle d'entrepreneur immobilier donc de création d'emplois"
Intox ou info ?
Intox !
Il n'y a nul lien obligatoire entre créer des emplois et s'enrichir !
Par contre s'enrichir sur le dos d'autrui, alors là, ça, c'est plus que souvent le cas.

Philippe a dit…

"Trump n'a rien créé du tout, à part des faillites et des licenciements massifs. Joli modèle que vous nous proposez là !"
Il a donc toutes les qualités requises pour être recyclé en médiocratie.
Bon c'est vache !

Anonyme a dit…

Je vous invite à lire le livre d'entretien entre le journaliste français André Bercoff et Donald Trump et/ou celui de la journaliste Anne Toulouse "dans la peau de Donald Trump" établie aux USA et qui a pris la nationalité américaine plutôt que de vous fier à une presse partisane. Le modèle que propose Madame Clinton n'est guère meilleur c'est bien pourquoi les 2 candidats ne sont vraiment pas estimés par les américains.
Quant au reste je me souviens que votre parti n'a pas hésité à encenser jusqu'à en faire un ministre Bernard Tapie qui était un Donald Trump sans la réussite de ce dernier.

Philippe a dit…

Peut-on ne pas s'enrichir sur le dos d'autrui ?
Possible si l'on créateur isolé de génie et qui dépose un brevet.
Possible de s'enrichir sur le dos des clients en ayant (souvent temporairement) un monopole permettant de vendre très cher aux clients. (accords illicites comme dans le passé dans les télécoms etc.)
La plupart du temps on devient riche en payant insuffisamment ses collaborateurs et en conservant le différentiel pour soi.
Par exemple l'esclavage/traite négrière en a été le modèle indépassable. Certaines familles en France ont été « lancé » grâce à cela et en bénéficie indirectement toujours voir ici :
http://www.lemonde.fr/societe/article/2015/05/09/traite-negriere-a-bordeaux-le-cran-a-assigne-en-justice-le-baron-seilliere_4630609_3224.html
L'Union Européenne a décidé de suivre de façon, certes plus « soft », ce modèle ignoble en instituant cyniquement le dumping social à grande échelle entre les pays membres.
Rappel : l'UE c'est pas des fantômes ce sont nos dirigeants quand ils se réunissent à Bruxelles en Conseils des ministres ou en Conseils de chefs d’État, Hollande, Sarkozy, Chirac, Mitterrand, Giscard …. de magouilles secrètes en magouilles secrètes …un livre :
« la grande dissimulation » de Christopher Booker et Richard North

F a dit…

Il a fait faillite lors de sa première entreprise qu'il a ainsi coulée.
Il a toutes les chances de récidiver lors de sa première présidence (s'il passe).
Le pire est à venir : son antagoniste ne paraît guère plus fiable.
Il n'y a pas grand chose de bon à attendre d'élections uninominales qui commencent par des primaires.
Et on a importé ça en France : quel succès !