lundi 6 février 2017

Fillon toujours pas protestant



Hier soir, à 23h45, j'ai eu une révélation, en regardant BFMTV. L'affaire Fillon, qui n'en finit pas de passionner le public et les médias, était à nouveau au centre des commentaires. Une animatrice, sourire ravi et yeux écarquillés, a tenu ce propos lumineux : "Il faut que François Fillon fasse son mea culpa, qu'il ne soit plus hyper-catholique [sic], mais devienne protestant [re-sic]. Ce n'est pas une question de légalité, mais de morale". Tout est dit : l'état d'esprit actuel de l'opinion s'exprime parfaitement dans cette réflexion, d'une sincérité et d'une pertinence remarquables.

Depuis Mai 68 et la libération des mœurs, la morale était jugée bourgeoise, conformiste, répressive, contestée et condamnée à ce titre. La déploration d'une perte des valeurs était constante. En réalité, il n'en est rien. Jamais la morale n'a été aussi forte et influente qu'aujourd'hui dans notre pays. Cette affaire Fillon en est l'illustration. La politique, l'idéologie, l'économie sont reléguées au second plan. Le jugement moral prévaut. Même le suffrage universel n'a pas le premier et le dernier mot : après tout, ne serait-ce pas, en démocratie, aux seuls citoyens électeurs de trancher à l'occasion du scrutin présidentiel ?

Ce n'est pas l'erreur politique qu'on dénonce, mais la faute morale qui choque. Toute morale recherche une religion qui puisse la justifier, réduire ou annuler sa part d'arbitraire. Dans notre monde, le protestantisme fait l'affaire. Importé avec l'américanisation de la France, il a l'avantage de produire une pure morale, dotée d'une transcendance et d'un culte réduits au minimum, qui convient à une population sceptique ou mécréante. Cette morale repose sur la condamnation de l'argent mal acquis et le mensonge public, y compris par omission. Voilà ce qui a fait tomber Fillon. Comme toute morale, celle-ci ne va pas sans hypocrisie. Car ce n'est pas l'argent et ses inégalités en tant que tels qui sont critiqués (un sportif professionnel ou un amuseur de télévision qui gagnent un fric fou et injustifié ne soulèvent pas l'indignation). Ce n'est pas le mensonge en soi qui est condamné, tant on sent bien qu'il est inévitable à la vie : c'est le fait de se faire prendre.

Ce qui a perdu François Fillon, ce qui a déclenché toute son affaire, c'est sans doute son aveu déplacé, à propos de la réforme de la Sécurité sociale : "Je suis chrétien". Comme si c'était un argument ! Comme si un engagement personnel et spirituel avait sa place dans le débat politique ! Le général de Gaulle allait à la messe tous les dimanches et n'a pourtant jamais dit, pour appuyer aucune de ses prises de position : "Je suis catholique". Fillon reçoit en pleine figure le bâton qu'il a agité : les Français retiennent de la religion chrétienne qu'elle récuse le mensonge et l'argent.

Alors, François Fillon a t-il satisfait au vœu de BFMTV, est-il devenu, lors de sa conférence de presse de cet après-midi, protestant ? Non, pas vraiment, ou à moitié, c'est-à-dire pas du tout, car la morale n'accepte pas la demi-mesure ou le moyen terme. "Je présente mes excuses aux Français", a-t-il déclaré. C'est une formule de politesse, pas un acte de contrition, une confession publique (les protestants n'admettent pas la confession privée), un repentir en bonne et due forme. Il a émis des regrets, pas des remords. Pour le dire à ma façon, Fillon s'est excusé d'être catholique, mais n'a pas épousé la foi protestante, puritaine et morale. Sinon, il aurait démissionné depuis longtemps.

4 commentaires:

D a dit…

M. FILLON sera légitimement candidat car il a été élu pour cela lors d'une primaire organisée à cet effet de désigner le "champion" devant représenter l'ensemble du contingent électoral de ladite primaire. Cette primaire n'a pas désigné de remplaçant éventuel de M FILLON au cas où ce dernier pour n'importe quel motif ne pourrait ou ne voudrait pas se présenter finalement.
Un "trésor" de guerre a même été constitué par les électeurs des deux tours de cette primaire.
Ce qui crée le buzz, ce n'est pas la déclaration d'appartenance à une religion particulière, ni une immoralité éventuelle, ce n'est pas non plus le fait d'avoir "employé" des membres de la proche famille, ce sont les montants des rémunérations qui semblent aux gens normaux excessives par rapport à la notoriété médiatique des personnes rémunérées, leur degré de qualification.
Les salaires des sportifs dits de haut niveau dans les sports médiatisés, des artistes, des acteurs de cinéma ne heurtent que les non sportifs ou les gens peu instruits des arts, les autres sont beaucoup moins critiques.
En conclusion de cette intervention, je dirai que si M FILLON avait par le passé pris la précaution de magnifier tant et plus le rôle de son épouse et de sa progéniture pour la menée à bien de sa carrière politique, la révélation du volatile aurait fait "pschitt".
C'est le hiatus entre l'absence de médiatisation des rémunérés et le montant des sommes touchées qui a soulevé la vague émotionnelle. Car il s'agit ici moins de morale que d'émotion populaire.
Je prétends pas avoir raison, c'est mon ressenti.

Philippe a dit…

à D
«C'est le hiatus entre l'absence de médiatisation des rémunérés et le montant des sommes touchées qui a soulevé la vague émotionnelle. Car il s'agit ici moins de morale que d'émotion populaire.
Je prétends pas avoir raison, c'est mon ressenti. »
Je n’avais pas pensé à cet aspect du problème qui, vous avez raison, rend possible cette campagne de dénigrement contre le candidat Fillon sur les médias mainstream.
Il s’y associe aussi la volonté de camoufler les comportements financiers d’autres candidats dont l’origine des revenus venant de pays étrangers anglo-saxons pour faire leurs campagnes tapageuses et onéreuses restent obscurs/cachés.

Philippe a dit…

Toute cette agitation autour des assistants parlementaires est sans doute en grande partie feinte de la part des «journalistes politiques ».
Il y a actuellement 577 députés et 348 sénateurs en France.
On ne vise, en « plein temps » médiatique, qu’un seul : F.Fillon presque 1 sur 1000, c’est un exploit en manipulation politicienne !
De même concernant Le Pen à Bruxelles.
Quand nous avions à St Quentin une députée européenne PS qui y avait permanence son assistant(e) parlementaire travaillait-il(elle) pour le « PS » français ou l’européen … qu’elle était la différence entre « PS » français et européen ? Il y avait une énorme porosité entre les deux niveaux !
Quelle hypocrisie monstrueuse !!!

Philippe a dit…

Je fais mon Erwan
Toutes ces exagérations des journalistes se ressentent des méthodes « trotskystes ».
Certains journalistes grisonnant en viennent directement ……….
Faire de la mousse autour de qq menus scandales pour affaiblir idéologiquement la démocratie bourgeoise … c’est ce à quoi les journalistes se prêtent.
Ils facilitent ce faisant l’éclosion et le développement des extrêmes de l’extrême : genre identitaires à l’extrême droite ou à l’extrême gauche les gaucho-islamistes.